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Taxer les ASC ? touche pas à mon CE !

Le petit monde des CE s’est agité depuis le mois d’avril 2016, quand la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a pondu des amendements à la loi TRAVAIL. Quatre de ces amendements visaient à plafonner les montants attribués annuellement par les CE aux salariés à travers les activités sociales et culturelles (ASC).

Il y était question de 10 % maximum du Plafond Mensuel de La Sécurité Sociale (PMSS) pour les avantages et cadeaux (soit 322 € en 2016) et de 20 % maximum du PMSS (soit 644 € en 2016) pour les biens culturels. Au-delà de ces montants, les avantages étaient soumis à cotisations sociales et à l’impôt sur le revenu, comme du salaire.

Ces amendements n’ont pas été intégrés par le gouvernement et n’ont donc pas fait partie de la loi TRAVAIL adoptée in fine.

Mais le mistigri est revenu dès la rentrée sous la forme d’un projet à inclure dans la loi de financement de la sécurité sociale 2017 (qui sera votée fin décembre 2016).

Inutile de créer un suspens inutile : les trois ministres concernés (Finances, Affaires sociales et Travail, soit Sapin, Touraine et El Khomri) se sont fendu très récemment d’une lettre commune pour annoncer que ce projet était abandonné. Mais…

Doit-on considérer que le sujet est définitivement enterré ?

Certainement pas ! Parce que l’endettement de la France est colossal (2171 milliards d’euros, 98.4 % du PIB) et que quel que soit le gouvernement qui suivra les élections de 2017 cette dette n’aura pas disparu entre temps… et que la recherche de ressources financières pour l’Etat reprendra de plus belle à la rentrée 2017…

Cela implique au moins deux conséquences pour les membres des comités d’entreprise :

  • Interpeler les candidats aux élections 2017 sur le sujet : « comptez-vous sur les CE pour participer au redressement de la Sécurité sociale ? ».
  • S’interpeler soi-même : qu’avons-nous fait depuis 30 ans pour que le problème arrive ainsi sur la table ?

En effet, depuis 30 ans, la financiarisation des ASC s’est trop développée : bons d’achat, remboursement d’activités sportives et culturelles, chèques vacances. Sous la pression combinée des salariés, toujours plus individualistes réclamant leur soi-disant « dû », et des prestataires qui proposent ces solutions.
Est-il mauvais de redistribuer une partie du budget des ASC sous forme de chèques cadeaux, vacances ou de remboursement d’activités ? Non.

Mais à trop transformer les ASC en distribution de papier monnaie on glisse lentement mais inexorablement vers la disparition de la notion d’activité sociale et culturelle. Si les « œuvres sociales » devenues les « activités sociales et culturelles » en octobre 1982, n’ont plus la même fonction qu’au 19ième siècle, qu’à l’entre-deux guerres ou aux années 40/50, elles sont restées un moyen pour les plus modestes d’accéder à la culture et aux activités sportives et, à tout le moins, un formidable outil d’animation de la communauté de travail.

Les CE les plus richement dotés offrent des solutions de vacances aux plus modestes, mais cette catégorie de CE s’amenuise au fur et à mesure que les entreprises de la « nouvelle économie » naissent avec, à leur tête, des dirigeants qui se contentent de saupoudrer les ASC de petits budgets, voire d’aucun budget. Dans un monde du travail où la souffrance et l’individualisme se développent créer du lien humain et social est indispensable.

  • Animer la communauté de travail demande du temps, de l’énergie et surtout une bonne observation des styles de vie de ses propres ayant droit. Mais quand nous voyons des élus s’y mettre de bon cœur, le résultat est toujours au rendez-vous.
  • Distribuer des billets de banque à travers un hygiaphone n’a rien d’humainement valorisant.
  • Être élu de CE demande de l’abnégation, du temps et de l’énergie.
  • Les élus de CE sont des gens bien et doivent le rester.
  • Ceux qui se cachent derrière la porte et attendent de pouvoir ramasser le pognon doivent en rester pour leur frais.

08/11/16
Nicolas DUBOST – Rédacteur en chef de MémentoCE

Qui veux donc piquer dans la caisse des CE ?

Essayons d’identifier les trois positions politico-économico-sociales à l’œuvre derrière ce projet qui empêche de dormir, à juste raison, bon nombre de secrétaires de CE :

  • Première position : bon sens, simplification administrative, élargissement des bénéficiaires, intérêt économique et commercial de certains prestataires. Car rappelons que les bons d’achat ne sont possibles que grâce à une tolérance administrative (voir notre conseil « bons d’achat ») .
    Introduire dans la loi ces règles permettait de rendre légal ce qui ne l’est pas et de l’étendre aux entreprises de moins de 50 salariés qui n’ont pas de CE. On peut y voir aussi l’intérêt commercial des sociétés produisant des bons d’achat qui rejoindraient l’ANCV dont les chèques vacances sont légalisés depuis leur création en 1984 dans le code du Tourisme.
  • Deuxième position : ceux qui pensent que les salariés qui bénéficient d’un CE (ou d’une structure assimilée de la fonction publique) sont des privilégiés et qu’ils doivent contribuer à l’effort de redressement des comptes sociaux. Une partie de ceux-là pensent même que tous les avantages accordés par les CE devraient être considérés comme du salaire.
    Problème : il y a 8 millions de salariés du privé sur 18 qui bénéficient d’un CE et 4.5 millions de fonctionnaires sur 5.5 d’une structure assimilée (seuls les enseignants n’en ont pas). Se mettre à dos 12.5 millions d’électeurs sur 45 à la veille des élections de 2017, drôle d’idée… on comprend mieux la lettre des trois ministres…
  • Troisième position : ceux qui pensent, au Trésor public ou aux Affaires sociales qu’il faut aller chercher l’argent partout et qui n’ont rien à faire des états d’âmes des secrétaires de CE comme de leurs ayant-droit.
    Ceux-là sont des gestionnaires, ni de droite ni de gauche, juste froids et cyniques mais qui influencent les politiques.