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Le CSE garde-fou contre le travail pendant les fortes chaleurs

Année après année, l’été s’annonce toujours plus chaud… Et pour les salariés, travailler sous ces fortes chaleurs constitue un véritable risque pour leur santé, un risque qui peut être mortel ! (7 décès notifiés à Santé Publique France durant l’été 2022).

Chaleur

Il est du devoir légal de l’employeur de protéger la santé des salariés. Tout chef d’entreprise doit donc prendre en compte les contraintes climatiques et trouver des moyens adaptés pour concilier le travail et ces fortes chaleurs.
Dans ce cadre, le CSE dispose d’un rôle déterminant à jouer. Ses attributions en matière de prévention font de lui un véritable gardien de la santé des salariés. En se basant notamment sur les recommandations des autorités publiques, il peut (doit) être force de proposition et veiller à ce que l’employeur respecte bien ses obligations.

Une notion de fortes chaleurs non définie…

L’Institut national de la santé publique du Québec a étudié l’impact de la hausse des températures au travail. Il a constaté que chaque degré au-dessus de 22 °C en Ontario entraînait une hausse de 75 % du nombre médian d’hospitalisations pour les malaises et les maladies au travail liés à la chaleur.

En France, malgré des « vagues de chaleur » de plus en plus récurrentes, le Code du travail ne définit pas la notion de « forte chaleur » et ne donne aucun élément, aucun seuil, pour permettre aux élus et à l’employeur de bien appréhender cette notion.

Même dans les guides ou circulaires les plus récents, aucune « valeur » n’est donnée par les autorités (cf. guide du ministère du travail ou encore l’instruction  DGT/CT4/2023/80 du 13 juin 2023 relative à la gestion des vagues de chaleur en 2023).

Dans une ancienne circulaire ministérielle, le gouvernement recommande de s’appuyer sur le dispositif de vigilance météorologique mis en place par Météo France dans le cadre général de la vigilance (jaune, orange, rouge) et d’alerte météorologique (cf. Circulaire interministérielle N° IOC/E/11/23223/C du 28 septembre 2011 relative à la procédure de l’alerte et de la vigilance météorologiques).

Seul l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) indique qu’au-delà de 30°C pour une activité sédentaire, et 28°C pour un travail nécessitant une activité physique, la chaleur peut constituer un risque pour les salariés.
https://www.inrs.fr/risques/chaleur/ce-qu-il-faut-retenir.html

Il peut donc être difficile pour les salariés, comme pour les élus, d’identifier la survenance d’une « forte chaleur ». Le CSE (et/ou la CSSCT quand elle existe) lors des inspections régulières qu’il doit mener sur le terrain doit faire une évaluation au cas par cas de ce risque au regard des conditions de travail de chaque salarié suivant leurs fonctions et conditions de travail respectives.

… dont le CSE doit s’emparer au regard de son pouvoir de prévention

Le CSE est un acteur de prévention des risques professionnels.

Le Code du travail le prévoit très clairement : il « formule, à son initiative … toute proposition de nature à améliorer les conditions de travail, d’emploi et de formation professionnelle des salariés, leurs conditions de vie dans l’entreprise à l’amélioration des conditions de travail dans l’entreprise » (art. L. 2312-12 CT).

Il procède ainsi à l’analyse des risques professionnels auxquels peuvent être exposés les travailleurs dans le cadre de leur mission (art. L. 2312-9 CT).

Pour cela, les élus réalisent des inspections des locaux de l’entreprise (art. L. 2312-13 CT) au moins 4 fois par an (à défaut d’accord – cf. art. R. 2312-4 et L. 2315-27 CT), et peuvent échanger avec les salariés sur leurs conditions de travail lorsqu’ils se rendent librement à leur rencontre (art. L. 2315-14 CT).

Le CSE peut aussi susciter tout initiative qu’il estime utile pour alerter les salariés sur les dangers des fortes chaleurs et les gestes à adopter (art. L. 2312-9 CT). Cela peut par exemple prendre la forme d’une proposition de mise en place d’une campagne de sensibilisation, de prévention par des acteurs spécialisés.

Le CSE dispose de moyens d’action vis-à-vis de l’employeur pour l’inciter à agir

Les élus peuvent présenter à l’employeur des réclamations individuelles et collectives relatives à l’application du Code du travail (art. L. 2312-5 CT).

Cela peut, par exemple, se traduire par la demande de mise à disposition d’eau fraiche ou encore l’aménagement des postes extérieurs pour protéger les travailleurs contre les conditions atmosphériques en application des obligations légales de l’employeur (cf. ci-dessous). Face à ces réclamations, l’employeur devra apporter une réponse justifiée et prendre les mesures appropriées si un manquement est constaté.

En cas de « danger grave et imminent » pour les salariés, les élus peuvent déclencher une alerte. Lorsqu’un représentant du personnel au CSE constate qu’il existe une cause de danger grave et imminent pour la sécurité et la santé d’un salarié, il en avise immédiatement l’employeur ou son représentant (art. L. 4131-2 CT).

Les fortes chaleurs peuvent en effet provoquer une déshydratation, un épuisement, des malaises augmentant le risque d’un accident du travail grave, parfois mortel.

L’employeur doit alors procéder sur le champ à une enquête avec le membre du CSE et prendre les dispositions nécessaires pour y remédier (art. L. 4132-2 CT et suivants).

NB : En ce début d’été, si la prochaine réunion est trop éloignée et que le sujet n’a pas été abordé, deux élus du CSE peuvent demander à l’employeur, par écrit, la convocation d’une réunion extraordinaire sur les questions relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail (art. L 2315-27, al. 2 CT) pour lui rappeler ses obligations légales et lui proposer de travailler de concert à la mise en place des recommandations définies par les autorités publiques.

Le CSE doit rappeler à l’employeur ses obligations

L’employeur est soumis à une obligation générale en matière de santé et de sécurité envers les salariés

L’article L. 4121-1 du Code du travail dispose ainsi que l’employeur doit prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. »

Ces mesures comprennent notamment des actions de prévention « des risques professionnels et de la pénibilité au travail » et la mise en place « d’une organisation et de moyens adaptés ».

Il doit veiller à adapter ces mesures « pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes ».

Des obligations réglementaires existent dans le cadre des fortes chaleurs pour les entreprises

Ainsi, l’employeur doit mettre à la disposition des travailleurs de l’eau potable et fraîche pour la boisson (art. R 4225-2 CT) et veiller à l’entretien et au bon fonctionnement des appareil de distribution, à la bonne conservation des boissons et à éviter toute contamination (art. R 4225-4 CT).

Lorsque des “conditions particulières de travail”, notion dont il faut souligner l’imprécision, conduisent les travailleurs à se désaltérer fréquemment, l’employeur doit mettre gratuitement à leur disposition au moins une boisson non alcoolisée. La liste des postes de travail concernés est établie par l’employeur, après avis du médecin du travail et du CSE (art. R 4225-3 CT).

Selon la Direction Générale du Travail, le salarié qui constate que l’employeur n’a pris aucune mesure pour le protéger contre les risques liés à la chaleur, ou a pris des mesures insuffisantes, ou refuse de mettre à sa disposition de l’eau fraîche et des locaux suffisamment aérés, est fondé à saisir l’inspection du travail. Cette dernière devra apprécier si les circonstances climatiques et la situation du salarié justifiaient ou non l’adoption de ces mesures (Circ. DGT nº 9 du 4 juillet 2013, NOR : ETST1317698C).

L’employeur doit aussi porter son attention sur l’aménagement des locaux.

Ainsi, dans les locaux fermés, l’employeur doit vérifier que la ventilation est correcte et conforme à la réglementation afin de renouveler l’air de façon à éviter les élévations exagérées de température, les odeurs désagréables et les condensations (art. R. 4222-1 CT).

L’employeur doit également aménager les postes extérieurs pour protéger les travailleurs contre les conditions atmosphériques (art. R. 4225-1 CT) : zones d’ombre, abris ou aires climatisées.

Il est important de rappeler que l’obligation patronale de sécurité et de protection de la santé ne s’arrête pas à des déclarations en séance de CSE ou à l’édiction de notes d’informations. Tout employeur doit en assurer l’effectivité.

En cas de risque avéré ou d’accident, l’employeur engage sa responsabilité, sauf s’il démontre avoir pris les mesures générales de prévention nécessaires et suffisantes pour l’éviter, ce qu’il appartient aux juges du fond d’apprécier souverainement (Cass. soc. 25 novembre 2015 n° 14-24.444).

Le CSE dans le cadre de son rôle de « vigie », de gardien de la santé des salariés, devra aussi veiller à l’actualisation du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) par l’employeur. Ce dernier doit, avec le concours des élus, identifier, évaluer et prévenir l’ensemble des risques professionnels auxquels sont exposés les travailleurs (art. L. 4121-3 CT).

Ainsi, afin de protéger au mieux les salariés, l’employeur devra évaluer les risques liés aux ambiances thermiques (art. R. 4121-1 CT) et établir un plan d’action de prévention de ce risque dans le Programme Annuel de Prévention des Risques Professionnels et d’Amélioration des Conditions de Travail (PAPRIPACT).

Les élus devront alors émettre un avis motivé sur ces documents mais ils pourront surtout proposer des aménagements, des compléments notamment en s’appuyant sur les recommandations des autorités publiques et sur leurs connaissances du terrain.   

Le CSE s’appuie sur les recommandations du gouvernement

Les autorités publiques ont publié au fil des années de nombreuses recommandations.

Une instruction de la DGT vient d’être publiée le 13 juin 2023 (INSTRUCTION N° DGT/CT4/2023/80 du 13 juin 2023 relative à la gestion des vagues de chaleur) et s’accompagne d’un guide s’adressant directement aux entreprises (« guide prévention chaleur 2023 »)

Ce guide recommande notamment d’adapter l’activité des salariés notamment en déployant les mesures de prévention définies préalablement dans le DUERP (cf. ci-dessus), si possible en faisant travailler les salariés aux heures les moins chaudes, en limitant le travail physique et en leur permettant d’adapter leur rythme (augmentation de la fréquence et de la durée des pauses).

Ce guide s’appuie notamment sur les travaux de l’INRS qui propose plusieurs recommandations (Travail à la chaleur. Ce qu’il faut retenir – Risques – INRS) :

  • Aménager les horaires de travail en période de fortes chaleurs en favorisant les heures les moins chaudes de la journée ;
  • Limiter le temps d’exposition du salarié à la chaleur en effectuant des rotations de personnel si possible ;
  • Augmenter la fréquence des pauses de récupération, dans des lieux frais ;
  • Limiter ou reporter le travail physique pour réduire la production de chaleur métabolique ;
  • Éviter le travail isolé, pour permettre une surveillance mutuelle des salariés et une intervention rapide si besoin ;
  • Former et informer les salariés sur les risques liés à la chaleur, les signes d’alerte du coup de chaleur et les mesures de premier secours.

Les élus peuvent aussi s’appuyer sur le guide ORSEC datant de 2021 et rédigé notamment par la direction générale de la santé (DGS). Ce guide recommande par exemple aux employeur (Fiche 02/K page 58) :

  • S’assurer que le port des protections individuelles est compatible avec les fortes chaleurs ;
  • Faire remonter toute situation anormale potentiellement en lien avec la chaleur au système d’inspection du travail ;
  • Surveiller la température des locaux ;
  • Mettre à disposition des moyens de protection et/ou de rafraîchissement : ventilateurs, brumisateurs, humidificateurs ;
  • Organiser des pauses supplémentaires ou plus longues aux heures les plus chaudes.

Il s’agit ici de recommandations et non d’obligations. L’employeur n’est donc pas obligé de les mettre en place.

Mais les élus de CSSCT et/ou de CSE peuvent lui rappeler que ces mesures sont un moyen pour lui de respecter son obligation en matière de santé et de sécurité des salariés. Elles peuvent éviter la réalisation d’un accident grave. Un tel accident engagerait sa responsabilité au travers de la « faute inexcusable » qui pourrait être reconnue alors qu’il avait conscience du danger auquel étaient exposés les salariés, grâce à la vigilance et aux avertissements du CSE.

Le CSE peut par ailleurs demander des mesures spécifiques pour des salariés exposés à un niveau de risque plus élevé que d’autres (femmes enceintes, salariés handicapés, état vulnérable connu par exemple).


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