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La banalisation de l’exceptionnel : la loi relative « à la gestion de la sortie de crise » est en vigueur

Le « projet de loi climat », ajoute aux attributions consultatives du CSE le thème de l’environnement. Quels sont à l’heure actuelle les moyens d’informations et d’actions des élus de CSE sur le thème de l’environnement dans leur entreprise ?

Des mesures, qui apparaissaient exceptionnelles il y a encore quelques mois, perdurent, bien que présentant encore un statut de mesures d’urgence, par nature provisoires.
En ce qui nous concerne, cette loi vise principalement :

  • Les dérogations en matière de prise de congés payés et de jours de repos
  • Les dérogations relatives au CDD et à l’intérim
  • Les dérogations relatives au prêt de main d’œuvre à but non-lucratif
  • La possibilité pour les services de santé au travail de reporter des visites médicales, outre la reconduction de leurs prérogatives spécifiques à la COVID-19
  • Le report des sanctions de la violation par l’employeur du droit des salariés à l’entretien professionnel bisannuel et à l’entretien récapitulatif
  • L’adaptation les dispositifs de limitation de l’impact de la crise sanitaire (activité partielle)
  • Les dispositions qui permettent de réunir le CSE à distance

Devant une crise dont la fin reste encore incertaine, voire précaire à l’annonce de chaque nouveau variant, quels sont les risques de voir ces mesures dites « exceptionnelles » faire définitivement leur nid dans notre Droit du travail ?
Si certaines mesures présentent réellement un caractère conjoncturel (I), d’autres, déjà en germe avant la crise, pourraient découvrir une nouvelle vitalité dans le « monde d’après » (II).

I – Les mesures de sortie de crise liées au contexte de la pandémie

Parmi les mesures sociales visées par la loi de sortie de crise, certaines apparaissent très liées au contexte sanitaire. Ainsi, le retour à une vie normale devrait voir s’éteindre les dispositions exceptionnelles suivantes.

1 – L’activité partielle

Figure emblématique de la lutte contre les conséquences sociales et économiques de la crise sanitaire, le régime adapté de l’activité partielle, dispositif qui n’était pas organisé à l’origine pour connaître une application aussi vaste, devrait logiquement se limiter à une application plus circonscrite.
Dans l’attente, la loi de sortie de crise autorise le Gouvernement à moduler le régime de l’activité partielle et de l’APLD jusqu’au 30 septembre 2021. Il est à noter que ces dispositions sont très régulièrement modifiées, pour vous tenir informés de l’état des règles à l’instant « T », vous pouvez utilement consulter cette page : https://travail-emploi.gouv.fr/le-ministere-en-action/coronavirus-covid-19/questions-reponses-par-theme/faq-chomage-partiel-activite-partielle

A la marge, la pérennisation de certaines adaptations serait bienvenue. On songe en particulier à celle concernant l’intégration des salariés au forfait-jours lorsque le recours à l’activité partielle n’est pas total.

2 – Nouveau report de visites médicales.

Depuis la première vague de Covid-19, plusieurs reports de visites médicales, qui n’avaient pas pu être réalisées du fait de l’épidémie, ont été organisées (ordonnance n° 2020-386 du 1er avril 2020 et décret n° 2020-410 du 8 avril 2020).
Ce nouveau texte permet désormais de reporter, dans la limite d’un an, des visites devant être réalisées avant le 30 septembre 2021 et non plus avant le 2 août.
Ainsi, sauf dans le cas où l’état de santé ou le poste occupé par le salarié présente un risque particulier, le médecin du travail peut reporter les visites d’information et de prévention initiale à l’embauche et leur renouvellement, et des visites de suivi périodique.
En revanche, pour les salariés qui font l’objet d’un suivi médical renforcé, la plupart des visites, à l’exception de la visite intermédiaire, ne peuvent pas être reportées.
En corollaire les missions attribuées aux services de santé au travail dans le cadre de la lutte contre la Covid-19 sont également prolongées jusqu’au 30 septembre 2021.
Cela concerne d’une part, les missions de lutte contre la propagation du virus, c’est-à-dire, les dispositifs d’accompagnement à la vaccination, de prévention et de test. D’autre part, jusqu’au 1er août 2021, le médecin du travail reste habilité à prescrire un arrêt de travail en cas d’infection ou de suspicion d’infection au virus. Il peut également établir un certificat médical pour les salariés vulnérables en vue de leur placement en activité partielle.
Ces mesures, qui suivent à l’évidence l’évolution de la pandémie et des réponses apportées (vaccination), devraient logiquement cesser de produire leurs effets à l’issue de la pandémie.

3 – L’entretien professionnel bisannuel

Autre mesure liée au contexte qui devrait cesser de s’appliquer à l’issue de la crise, sous réserve d’un nouveau rebond épidémique, le report des sanctions prononcées en cas de violation par l’employeur du droit à l’entretien professionnel bisannuel en vue d’examiner les perspectives d’évolution professionnelle et du droit à l’entretien récapitulatif tous les six ans.
Dans les entreprises de plus de 50 salariés, selon les dispositions des articles L. 6315-1 et L. 6323-13 du Code du travail, modifiés par la loi du 5 septembre 2018, le compte personnel de formation (CPF) du salarié est abondé (jusqu’à 3000€) lorsqu’au cours d’une période de 6 ans, ce dernier n’a pas bénéficié des entretiens professionnels prévus et d’au moins une formation autre qu’une formation « obligatoire ».
La loi de sortie de crise ne permet pas de repousser les entretiens, mais elle neutralise les sanctions jusqu’au 30 septembre. L’employeur dispose d’un droit d’option pour justifier avoir accompli son obligation : soit démontrer que le salarié a bénéficié des entretiens professionnels et, au moins, d’une formation autre que celles obligatoires ; soit, jusqu’au 30 septembre, établir que le salarié a bénéficié au cours des 6 dernières années des entretiens professionnels et qu’il a suivi au moins 2 des 3 actions suivantes : action de formation ; acquisition d’une certification ; progression salariale ou professionnelle.
Mais, le défaut de sanction doit-il faire craindre que nombre d’entretiens seront encore repoussés ?

II – Les mesures susceptibles de prospérer dans le « monde d’après »

Si les mesures décrites précédemment pourraient s’éteindre à l’issue de la crise sanitaire, d’autres pourraient s’inscrire durablement dans le droit « commun » du travail.

1 – Réunions des instances représentatives du personnel à distance

En premier lieu, les élus de CSE peuvent s’inquiéter de la pérennisation de la possibilité pour l’employeur d’organiser les réunions des instances représentatives du personnel à distance.
L’article 8 XII de la loi prolonge le dispositif dérogatoire jusqu’au 30 septembre 2021.
Les modalités fixées par l’ordonnance du 25 novembre sont donc prolongées, à savoir :

  • La visioconférence est autorisée pour l’ensemble des réunions du CSE et du CSE central. Une simple information du CSE par l’employeur suffit pour utiliser la visioconférence. La période d’état d’urgence sanitaire est neutralisée pour le décompte des trois réunions par année civile que l’employeur peut organiser par visioconférence à défaut d’accord conclu avec le CSE (art. L.2315-4 C.trav.). La visioconférence peut être utilisée pour les autres réunions des IRP dans l’entreprise (réunions de négociation collective avec les organisations syndicales, par exemple) ;
  • Conférence téléphonique : normalement interdite car elle ne permet pas l’identification continue des participants, l’ordonnance autorise le recours à la conférence téléphonique pour l’ensemble des réunions des instances représentatives du personnel dans l’entreprise (CSE, réunions syndicales…), « après que l’employeur en a informé leurs membres » ce qui implique que la décision d’utiliser ce dispositif revient encore à l’employeur ;
  • Messagerie instantanée : En cas d’impossibilité de recourir à la visioconférence ou à la conférence téléphonique, ou lorsqu’un accord le prévoit, un dispositif de messagerie instantanée peut être utilisé pour tenir les réunions de ces mêmes instances représentatives du personnel, « après information de leurs membres ». Sauf accord, la décision de l’employeur est donc soumise à la justification de l’impossibilité d’organiser une visioconférence ou une conférence téléphonique, point sur lequel il convient donc d’être attentif en interrogeant l’employeur et en transcrivant sa réponse sur le procès-verbal de la réunion. La régularité de la réunion pourrait en effet s’en trouver affectée.

Il est toutefois prévu que les membres élus du CSE puissent, à la majorité de ceux appelés à y siéger, s’opposer, au plus tard 24 heures avant le début de la réunion, pour :
– les informations et consultations menées dans le cadre des procédures de licenciements collectifs,
– la mise en œuvre des accords de performance collective, d’activité partielle longue durée et rupture conventionnelle collective.

La communication des différents membres du gouvernement laisse à penser que ce dispositif dérogatoire pourrait avoir servi de galop d’essai à une réforme du recours à la visioconférence pour les réunions des IRP … alors que l’accord national interprofessionnel sur le télétravail du 26 novembre 2020 invite à négocier des accords tenant compte de la question du dialogue social en vue de :

  • « L’assouplissement des modalités d’organisation des informations et consultation, ainsi que des négociations (aménagement des délais de consultation, réunions en visioconférence) ;
  • L’adaptation des règles de communication entre les salariés et leurs représentants et/ou les représentants syndicaux visant à faciliter l’exercice du droit syndical en cas de télétravail. »

Cette tendance à devoir négocier les modalités de fonctionnement des instances, sur des points qui semblaient autrefois acquis, n’aide pas les instances représentatives du personnel à exercer convenablement leurs prérogatives ou à éviter de devoir faire des concessions trop importantes sur d’autres plans (rôle consultatif). Derrière cette logique, déjà à l’œuvre dans l’ordonnance du 22 septembre 2017 qui a institué le CSE, c’est le devenir des collectifs de travail de la capacité des IRP à les représenter et à défendre leurs intérêts efficacement qui est, une nouvelle fois, en jeu.

2 – Contrat de travail à durée déterminée et de travail temporaire

Par ailleurs, la loi ici commentée prolonge jusqu’au 30 septembre 2021, les dérogations possibles par accord d’entreprise, en matière de contrat de travail à durée déterminée et de travail temporaire (intérim) alors qu’elles n’étaient possibles que dans le cadre de négociation de branche depuis l’ordonnance du 22 septembre 2017 (n°2017-1387).
Ces dérogations permettent de définir ou aménager :
– le nombre de renouvellements possibles (sans avoir pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise),
– les modalités de calcul des délais de carence entre deux contrats successifs,
– les cas dans lesquels ces délais de carence ne sont pas applicables.
Les stipulations de l’accord d’entreprise conclu en vertu de cette dérogation sont applicables aux contrats conclus jusqu’au 31 décembre 2020 ou à la date fixée par l’accord, qui ne peut pas excéder le 30 septembre prochain. Elles prévalent sur les aménagements éventuellement opérés par une convention de branche, dérogeant ici à la règle de primauté des dispositions de la branche en cette matière (art. L.2253-1 C.trav.).
En ouvrant la possibilité de négocier ces aspects au niveau de l’entreprise, le risque de dumping social serait relevé et la précarité de certains emplois pourraient augmenter.

3 – Prêt de main d’œuvre à but non lucratif

Il en est de même pour les dérogations relatives au prêt de main d’œuvre à but non lucratif, pour permettre aux entreprises dont l’activité est réduite de mettre leurs salariés à disposition d’entreprises ayant un besoin de main d’œuvre, prolongées jusqu’au 30 septembre 2021.
Ainsi, dans ce cadre, la mise à disposition peut, de manière dérogatoire, suivre le schéma suivant :

  • Une convention portant sur la mise à disposition de plusieurs salariés, alors que le mécanisme de base impose une convention par salarié (art. L8241-2 C.trav.) ;
  • Les avenants individuels ne sont pas tenus de préciser les horaires des intéressés, mais seulement un volume global ; il appartient ensuite à l’entreprise utilisatrice de définir les horaires en accord avec le salarié ;
  • Le prêt n’a pas de but lucratif pour les entreprises utilisatrices, même lorsque le montant facturé par l’entreprise prêteuse, qui recourt à l’activité partielle, est inférieur aux salaires versés, aux charges sociales et aux frais professionnels au titre de la mise à disposition temporaire, ou est égal à zéro.
  • A première vue, cette disposition, qui était à l’origine pensée pour maintenir en activité des salariés placés en activité partielle, au profit d’entreprises qui avaient besoin de bras, semble conjoncturelle.

Ce type de mesure, qui épouse la dynamique d’accroissement des mobilités et d’un régime des « transitions professionnelles » soutenues, pourrait donner des idées aux prochains réformateurs. Il faudra cependant prendre garde à ce que le « capital humain » ne soit pas considéré comme un simple « capital », échangeable, transférable, au gré des seuls besoins des entreprises, évalués en termes d’offres et de demandes. Ce que ce pan de la législation relatif à la lutte contre le travail illégal a précisément pour objet initial de combattre, bien que certaines brèches aient déjà été élargies par les ordonnances du mois de septembre 2017 (cf. art. L.8241-3 C.Trav.).

4 – Congés payés et repos

Enfin, les dispositions dérogatoires en matière de congés payés et de repos sont prolongées jusqu’au 30 septembre 2021.
Elles concernent la possibilité offerte à l’employeur, sous réserve de la conclusion d’un accord collectif de branche ou d’entreprise, d’imposer la prise de congés payés ou de modifier les dates de prise des congés, dans des délais très serrés (1 jour franc).
Petite innovation, la loi de gestion de sortie de crise réhausse de 6 à 8 jours le nombre de jours de congés que pourrait imposer l’employeur dans ce cadre.
De surcroît, la possibilité offerte à l’employeur de décider unilatéralement d’imposer, sous réserve d’informer sans délai le CSE et de justifier de difficultés économiques liées à la propagation du virus, la prise de jours de repos (RTT, jours de repos liés à un mécanisme d’annualisation ou de forfait, droits à repos affectés à un CET), est maintenue dans la même limite de 10 jours.
L’employeur doit informer et consulter le CSE. Cependant, l’avis du CSE, qui doit être rendu dans le délai d’un mois, peut intervenir après que la décision de l’employeur a été mise en œuvre. Cette exception au principe du caractère préalable de la consultation du CSE (art. L.2312-14 C.trav.), déjà utilisée dans le cadre des dispositions exceptionnelles relatives à l’activité partielle, pourrait devenir une source d’inquiétude si elle était amenée à se répandre à d’autres hypothèses.
Ce caractère préalable de la consultation est une condition indispensable pour une intervention efficace des élus, tant pour mettre à l’épreuve l’intelligence du projet de l’employeur, que pour jouer son rôle de contre-pouvoir et participer à la construction du projet. Il est cardinal dans la mécanique du CSE et sa détérioration transformerait l’instance en simple chambre d’enregistrement des décisions patronales.

En définitive, il y a des raisons de penser que certaines dispositions, pourtant présentées comme des mesures d’urgence dont l’application serait temporaire, s’inscrivent dans des dynamiques plus profondes de transformation du Droit du travail. Le « monde d’après » sera donc aussi celui de la vigilance.Des mesures, qui apparaissaient exceptionnelles il y a encore quelques mois, perdurent, bien que présentant encore un statut de mesures d’urgence, par nature provisoires.
En ce qui nous concerne, cette loi vise principalement :

  • Les dérogations en matière de prise de congés payés et de jours de repos
  • Les dérogations relatives au CDD et à l’intérim
  • Les dérogations relatives au prêt de main d’œuvre à but non-lucratif
  • La possibilité pour les services de santé au travail de reporter des visites médicales, outre la reconduction de leurs prérogatives spécifiques à la COVID-19
  • Le report des sanctions de la violation par l’employeur du droit des salariés à l’entretien professionnel bisannuel et à l’entretien récapitulatif
  • L’adaptation les dispositifs de limitation de l’impact de la crise sanitaire (activité partielle)
  • Les dispositions qui permettent de réunir le CSE à distance

Devant une crise dont la fin reste encore incertaine, voire précaire à l’annonce de chaque nouveau variant, quels sont les risques de voir ces mesures dites « exceptionnelles » faire définitivement leur nid dans notre Droit du travail ?
Si certaines mesures présentent réellement un caractère conjoncturel (I), d’autres, déjà en germe avant la crise, pourraient découvrir une nouvelle vitalité dans le « monde d’après » (II).

I – Les mesures de sortie de crise liées au contexte de la pandémie

Parmi les mesures sociales visées par la loi de sortie de crise, certaines apparaissent très liées au contexte sanitaire. Ainsi, le retour à une vie normale devrait voir s’éteindre les dispositions exceptionnelles suivantes.

1 – L’activité partielle

Figure emblématique de la lutte contre les conséquences sociales et économiques de la crise sanitaire, le régime adapté de l’activité partielle, dispositif qui n’était pas organisé à l’origine pour connaître une application aussi vaste, devrait logiquement se limiter à une application plus circonscrite.
Dans l’attente, la loi de sortie de crise autorise le Gouvernement à moduler le régime de l’activité partielle et de l’APLD jusqu’au 30 septembre 2021. Il est à noter que ces dispositions sont très régulièrement modifiées, pour vous tenir informés de l’état des règles à l’instant « T », vous pouvez utilement consulter cette page : https://travail-emploi.gouv.fr/le-ministere-en-action/coronavirus-covid-19/questions-reponses-par-theme/faq-chomage-partiel-activite-partielle

A la marge, la pérennisation de certaines adaptations serait bienvenue. On songe en particulier à celle concernant l’intégration des salariés au forfait-jours lorsque le recours à l’activité partielle n’est pas total.

2 – Nouveau report de visites médicales.

Depuis la première vague de Covid-19, plusieurs reports de visites médicales, qui n’avaient pas pu être réalisées du fait de l’épidémie, ont été organisées (ordonnance n° 2020-386 du 1er avril 2020 et décret n° 2020-410 du 8 avril 2020).
Ce nouveau texte permet désormais de reporter, dans la limite d’un an, des visites devant être réalisées avant le 30 septembre 2021 et non plus avant le 2 août.
Ainsi, sauf dans le cas où l’état de santé ou le poste occupé par le salarié présente un risque particulier, le médecin du travail peut reporter les visites d’information et de prévention initiale à l’embauche et leur renouvellement, et des visites de suivi périodique.
En revanche, pour les salariés qui font l’objet d’un suivi médical renforcé, la plupart des visites, à l’exception de la visite intermédiaire, ne peuvent pas être reportées.
En corollaire les missions attribuées aux services de santé au travail dans le cadre de la lutte contre la Covid-19 sont également prolongées jusqu’au 30 septembre 2021.
Cela concerne d’une part, les missions de lutte contre la propagation du virus, c’est-à-dire, les dispositifs d’accompagnement à la vaccination, de prévention et de test. D’autre part, jusqu’au 1er août 2021, le médecin du travail reste habilité à prescrire un arrêt de travail en cas d’infection ou de suspicion d’infection au virus. Il peut également établir un certificat médical pour les salariés vulnérables en vue de leur placement en activité partielle.
Ces mesures, qui suivent à l’évidence l’évolution de la pandémie et des réponses apportées (vaccination), devraient logiquement cesser de produire leurs effets à l’issue de la pandémie.

3 – L’entretien professionnel bisannuel

Autre mesure liée au contexte qui devrait cesser de s’appliquer à l’issue de la crise, sous réserve d’un nouveau rebond épidémique, le report des sanctions prononcées en cas de violation par l’employeur du droit à l’entretien professionnel bisannuel en vue d’examiner les perspectives d’évolution professionnelle et du droit à l’entretien récapitulatif tous les six ans.
Dans les entreprises de plus de 50 salariés, selon les dispositions des articles L. 6315-1 et L. 6323-13 du Code du travail, modifiés par la loi du 5 septembre 2018, le compte personnel de formation (CPF) du salarié est abondé (jusqu’à 3000€) lorsqu’au cours d’une période de 6 ans, ce dernier n’a pas bénéficié des entretiens professionnels prévus et d’au moins une formation autre qu’une formation « obligatoire ».
La loi de sortie de crise ne permet pas de repousser les entretiens, mais elle neutralise les sanctions jusqu’au 30 septembre. L’employeur dispose d’un droit d’option pour justifier avoir accompli son obligation : soit démontrer que le salarié a bénéficié des entretiens professionnels et, au moins, d’une formation autre que celles obligatoires ; soit, jusqu’au 30 septembre, établir que le salarié a bénéficié au cours des 6 dernières années des entretiens professionnels et qu’il a suivi au moins 2 des 3 actions suivantes : action de formation ; acquisition d’une certification ; progression salariale ou professionnelle.
Mais, le défaut de sanction doit-il faire craindre que nombre d’entretiens seront encore repoussés ?

II – Les mesures susceptibles de prospérer dans le « monde d’après »

Si les mesures décrites précédemment pourraient s’éteindre à l’issue de la crise sanitaire, d’autres pourraient s’inscrire durablement dans le droit « commun » du travail.

1 – Réunions des instances représentatives du personnel à distance

En premier lieu, les élus de CSE peuvent s’inquiéter de la pérennisation de la possibilité pour l’employeur d’organiser les réunions des instances représentatives du personnel à distance.
L’article 8 XII de la loi prolonge le dispositif dérogatoire jusqu’au 30 septembre 2021.
Les modalités fixées par l’ordonnance du 25 novembre sont donc prolongées, à savoir :

  • La visioconférence est autorisée pour l’ensemble des réunions du CSE et du CSE central. Une simple information du CSE par l’employeur suffit pour utiliser la visioconférence. La période d’état d’urgence sanitaire est neutralisée pour le décompte des trois réunions par année civile que l’employeur peut organiser par visioconférence à défaut d’accord conclu avec le CSE (art. L.2315-4 C.trav.). La visioconférence peut être utilisée pour les autres réunions des IRP dans l’entreprise (réunions de négociation collective avec les organisations syndicales, par exemple) ;
  • Conférence téléphonique : normalement interdite car elle ne permet pas l’identification continue des participants, l’ordonnance autorise le recours à la conférence téléphonique pour l’ensemble des réunions des instances représentatives du personnel dans l’entreprise (CSE, réunions syndicales…), « après que l’employeur en a informé leurs membres » ce qui implique que la décision d’utiliser ce dispositif revient encore à l’employeur ;
  • Messagerie instantanée : En cas d’impossibilité de recourir à la visioconférence ou à la conférence téléphonique, ou lorsqu’un accord le prévoit, un dispositif de messagerie instantanée peut être utilisé pour tenir les réunions de ces mêmes instances représentatives du personnel, « après information de leurs membres ». Sauf accord, la décision de l’employeur est donc soumise à la justification de l’impossibilité d’organiser une visioconférence ou une conférence téléphonique, point sur lequel il convient donc d’être attentif en interrogeant l’employeur et en transcrivant sa réponse sur le procès-verbal de la réunion. La régularité de la réunion pourrait en effet s’en trouver affectée.

Il est toutefois prévu que les membres élus du CSE puissent, à la majorité de ceux appelés à y siéger, s’opposer, au plus tard 24 heures avant le début de la réunion, pour :
– les informations et consultations menées dans le cadre des procédures de licenciements collectifs,
– la mise en œuvre des accords de performance collective, d’activité partielle longue durée et rupture conventionnelle collective.

La communication des différents membres du gouvernement laisse à penser que ce dispositif dérogatoire pourrait avoir servi de galop d’essai à une réforme du recours à la visioconférence pour les réunions des IRP … alors que l’accord national interprofessionnel sur le télétravail du 26 novembre 2020 invite à négocier des accords tenant compte de la question du dialogue social en vue de :

  • « L’assouplissement des modalités d’organisation des informations et consultation, ainsi que des négociations (aménagement des délais de consultation, réunions en visioconférence) ;
  • L’adaptation des règles de communication entre les salariés et leurs représentants et/ou les représentants syndicaux visant à faciliter l’exercice du droit syndical en cas de télétravail. »

Cette tendance à devoir négocier les modalités de fonctionnement des instances, sur des points qui semblaient autrefois acquis, n’aide pas les instances représentatives du personnel à exercer convenablement leurs prérogatives ou à éviter de devoir faire des concessions trop importantes sur d’autres plans (rôle consultatif). Derrière cette logique, déjà à l’œuvre dans l’ordonnance du 22 septembre 2017 qui a institué le CSE, c’est le devenir des collectifs de travail de la capacité des IRP à les représenter et à défendre leurs intérêts efficacement qui est, une nouvelle fois, en jeu.

2 – Contrat de travail à durée déterminée et de travail temporaire

Par ailleurs, la loi ici commentée prolonge jusqu’au 30 septembre 2021, les dérogations possibles par accord d’entreprise, en matière de contrat de travail à durée déterminée et de travail temporaire (intérim) alors qu’elles n’étaient possibles que dans le cadre de négociation de branche depuis l’ordonnance du 22 septembre 2017 (n°2017-1387).
Ces dérogations permettent de définir ou aménager :
– le nombre de renouvellements possibles (sans avoir pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise),
– les modalités de calcul des délais de carence entre deux contrats successifs,
– les cas dans lesquels ces délais de carence ne sont pas applicables.
Les stipulations de l’accord d’entreprise conclu en vertu de cette dérogation sont applicables aux contrats conclus jusqu’au 31 décembre 2020 ou à la date fixée par l’accord, qui ne peut pas excéder le 30 septembre prochain. Elles prévalent sur les aménagements éventuellement opérés par une convention de branche, dérogeant ici à la règle de primauté des dispositions de la branche en cette matière (art. L.2253-1 C.trav.).
En ouvrant la possibilité de négocier ces aspects au niveau de l’entreprise, le risque de dumping social serait relevé et la précarité de certains emplois pourraient augmenter.

3 – Prêt de main d’œuvre à but non lucratif

Il en est de même pour les dérogations relatives au prêt de main d’œuvre à but non lucratif, pour permettre aux entreprises dont l’activité est réduite de mettre leurs salariés à disposition d’entreprises ayant un besoin de main d’œuvre, prolongées jusqu’au 30 septembre 2021.
Ainsi, dans ce cadre, la mise à disposition peut, de manière dérogatoire, suivre le schéma suivant :

  • Une convention portant sur la mise à disposition de plusieurs salariés, alors que le mécanisme de base impose une convention par salarié (art. L8241-2 C.trav.) ;
  • Les avenants individuels ne sont pas tenus de préciser les horaires des intéressés, mais seulement un volume global ; il appartient ensuite à l’entreprise utilisatrice de définir les horaires en accord avec le salarié ;
  • Le prêt n’a pas de but lucratif pour les entreprises utilisatrices, même lorsque le montant facturé par l’entreprise prêteuse, qui recourt à l’activité partielle, est inférieur aux salaires versés, aux charges sociales et aux frais professionnels au titre de la mise à disposition temporaire, ou est égal à zéro.
  • A première vue, cette disposition, qui était à l’origine pensée pour maintenir en activité des salariés placés en activité partielle, au profit d’entreprises qui avaient besoin de bras, semble conjoncturelle.

Ce type de mesure, qui épouse la dynamique d’accroissement des mobilités et d’un régime des « transitions professionnelles » soutenues, pourrait donner des idées aux prochains réformateurs. Il faudra cependant prendre garde à ce que le « capital humain » ne soit pas considéré comme un simple « capital », échangeable, transférable, au gré des seuls besoins des entreprises, évalués en termes d’offres et de demandes. Ce que ce pan de la législation relatif à la lutte contre le travail illégal a précisément pour objet initial de combattre, bien que certaines brèches aient déjà été élargies par les ordonnances du mois de septembre 2017 (cf. art. L.8241-3 C.Trav.).

4 – Congés payés et repos

Enfin, les dispositions dérogatoires en matière de congés payés et de repos sont prolongées jusqu’au 30 septembre 2021.
Elles concernent la possibilité offerte à l’employeur, sous réserve de la conclusion d’un accord collectif de branche ou d’entreprise, d’imposer la prise de congés payés ou de modifier les dates de prise des congés, dans des délais très serrés (1 jour franc).
Petite innovation, la loi de gestion de sortie de crise réhausse de 6 à 8 jours le nombre de jours de congés que pourrait imposer l’employeur dans ce cadre.
De surcroît, la possibilité offerte à l’employeur de décider unilatéralement d’imposer, sous réserve d’informer sans délai le CSE et de justifier de difficultés économiques liées à la propagation du virus, la prise de jours de repos (RTT, jours de repos liés à un mécanisme d’annualisation ou de forfait, droits à repos affectés à un CET), est maintenue dans la même limite de 10 jours.
L’employeur doit informer et consulter le CSE. Cependant, l’avis du CSE, qui doit être rendu dans le délai d’un mois, peut intervenir après que la décision de l’employeur a été mise en œuvre. Cette exception au principe du caractère préalable de la consultation du CSE (art. L.2312-14 C.trav.), déjà utilisée dans le cadre des dispositions exceptionnelles relatives à l’activité partielle, pourrait devenir une source d’inquiétude si elle était amenée à se répandre à d’autres hypothèses.
Ce caractère préalable de la consultation est une condition indispensable pour une intervention efficace des élus, tant pour mettre à l’épreuve l’intelligence du projet de l’employeur, que pour jouer son rôle de contre-pouvoir et participer à la construction du projet. Il est cardinal dans la mécanique du CSE et sa détérioration transformerait l’instance en simple chambre d’enregistrement des décisions patronales.

En définitive, il y a des raisons de penser que certaines dispositions, pourtant présentées comme des mesures d’urgence dont l’application serait temporaire, s’inscrivent dans des dynamiques plus profondes de transformation du Droit du travail. Le « monde d’après » sera donc aussi celui de la vigilance.

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