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Les années 2000 : Le CE sur le front de l’emploi

Depuis la crise économique et financière de 2008, le rôle économique des comités d’entreprise s’est intensifié. Nombreux ont été les élus contraints de faire face, parfois pour la première fois, à un PSE. Conséquences, les rapports de forces dans les entreprises se sont durcis, entrainant des luttes sociales de grande ampleur et une médiatisation de certains de leurs leaders.

L’existence et les droits des représentations de salariés sont tributaires du contexte et des rapports de forces dans la société. Comme nous l’avons retracé dans cette « Saga des CE », le parcours des comités d’entreprise est jalonné par les grands évènements du 20e siècle : Front populaire, Occupation, Résistance, Trente Glorieuses, émergence de la société de consommation, élection de la gauche en 1981… Aujourd’hui, au 21e siècle, c’est la mondialisation et la crise économique et financière qui forment l’arrière-fond de l’histoire contemporaine des comités d’entreprise.

Délocalisations, fermetures de sites, restructurations, licenciements sont maintenant le pain quotidien des élus de CE ou de CCE qui ont souvent le sentiment frustrant, voire décourageant, de ne pas avoir prise sur tout cela. L’intensification des rapports de forces et la dégradation du dialogue social amplifient encore davantage cette impression d’impuissance face au déluge de salariés licenciés.

Le rôle du CE se complexifie

À cause de l’internationalisation des grandes firmes, de leur organisation et de leurs centres de décision les représentations du personnel sont souvent privées d’interlocuteurs pertinents. Sur le terrain, la gestion courante ou les anticipations stratégiques relèvent d’une politique mondialisée, opposée aux représentants des salariés comme un impératif sur lequel les managers locaux n’ont pas prise. Cette stratégie, on le sait bien, prend sa source à l’international, au moins en Europe, et se déploie dans une dimension bien plus large que nationale. La coordination, au minimum européenne, des représentations salariales s’impose peu à peu face à cette réalité, mais de façon encore très discrète…

Si le rôle du CE est parfois perçu par les salariés à travers les activités sociales et culturelle, sa fonction première est d’intervenir sur toutes les questions liées à la gestion et à la marche de l’entreprise, pour y défendre les intérêts collectifs des salariés. Pour cela, la loi le dote des moyens d’appuyer ses interventions sur des travaux d’expertise. La LSE (loi de sécurisation de l’emploi) vient même de lui reconnaître un droit d’information et d’intervention dans le domaine de la stratégie, considéré jusqu’alors comme la chasse gardée des dirigeants. La crise est loin d’être terminée. La nécessité d’une coordination au moins européenne des représentants de salariés se fait de plus en plus pressante.

Dans ce contexte de vulnérabilité des emplois, le comité d’entreprise, fort de sa longue expérience, constitue une instance précieuse pour les salariés qu’il faut protéger et faire prospérer. Une mutation profonde est en cours dans le monde du travail, elle a et aura un impact important sur les relations entre salariés et direction et par là sur les Instances Représentatives du Personnel : la célébration des soixante-dix ans des comités d’entreprise vient nous rappeler à la fois les expériences passées et cet avenir problématique. Profitons-en pour réfléchir ensemble, anticiper et nous projeter avec confiance dans le mouvement de l’histoire.

Le rapport de forces s’intensifie

En France (comme dans tous les pays de l’Union européenne), la législation encadrant les restructurations est contraignante. Créée après les crises de la sidérurgie, comme en Lorraine, la loi a, au fil du temps, souligné de plus en plus la responsabilité des entreprises en matière d’indemnisation des préjudices subis. Mais les directions d’entreprise ne jouent pas toujours le jeu du dialogue, ce qui incite syndicats et salariés à user du rapport de forces.

Les séquestrations de dirigeants d’entreprise chez Faurecia, Scapa, Caterpillar, Heuliez, 3M et Sony apparaissent comme la dernière arme des salariés pour négocier leurs conditions de départ. Ces bossnappings, commis parfois sur les seuls signes annonciateurs d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), provoquent une polémique politique mais recueillent la tolérance voire l’approbation de la population : 63 % des Français comprennent ces actes de violence (sondage Ifop) ; 30 % les approuvent ; seulement 7 % les condamnent !

Moins que l’intensité des restructurations liée à la crise, c’est la gestion des licenciements collectifs qui n’est pas acceptée. L’arsenal législatif destiné à protéger les salariés lors de restructurations s’est développé en Europe jusque dans les années 2000. Dans les années 1980 ont été mis en place des instruments de reclassement (congés de conversion). Mais dès les années 1990, les sociétés ont intégré que les restructurations n’étaient plus seulement conjoncturelles et elles ont commencé à faire de la gestion prévisionnelle des effectifs.

En 2002, la loi de modernisation sociale, modifiée en 2005, a renforcé la responsabilité des dirigeants sur l’évolution de l’emploi des salariés et dans le territoire où est implantée l’entreprise, exigeant de financer des actions de revitalisation des bassins d’emploi en cas de fermeture totale ou partielle de sites, à hauteur de deux Smic par licenciement pour les sociétés de plus de 1 000 personnes (par exemple Continental à Clairoix).

Mais ces avancées législatives se sont parfois retournées contre les salariés… Confrontés à la loi de modernisation sociale, qui invite les entreprises à chercher toutes les solutions possibles hors licenciement, et alors que le nombre de PSE augmentait, les employeurs ont de plus en plus privilégié les accords individuels pour rompre le contrat de travail.En partenariat avec :