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La misère de la classe ouvrière au milieu du 19e siècle est à l’origine des premières règles du droit du travail, puis de celles de l’aide sociale. Mais la question de l’aide juridique du travailleur pauvre peut être datée de 2009 quand le revenu de solidarité active (RSA) s’est substitué au revenu minimum d’insertion (RMI) et à l’allocation de parent isolé (API) dans une logique de lutte contre la pauvreté axée sur le soutien au travail.

Présentation

Ils seraient entre deux et trois millions en France… Les statisticiens peinent à cerner le phénomène croissant des travailleurs pauvres, qu’ils imputent notamment au temps partiel dans les services à la personne ou la restauration. Il s’agit d’une situation récente pour laquelle aucun système d’observation adapté n’existe vraiment. Un million de personnes exercent un emploi, mais disposent, après avoir comptabilisé les prestations sociales (primes pour l’emploi, allocations logement, etc.) ou intégré les revenus de leur conjoint, d’un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté établi à la moitié du revenu médian, soit 814 euros selon les données 2011.

En revanche, elles sont près de deux millions si l’on prend en compte le seuil à 60 % du revenu médian, soit 977 euros, reconnu par l’Insee. Le nombre de travailleurs pauvres a ainsi augmenté de 83 000 personnes entre 2003 et 2010 au seuil de 50 % et de 154 000 au seuil de 60 % du revenu médian.

Ces chiffres de 2010 ont certainement encore progressé avec l’accentuation de la crise. Si l’on compte l’ensemble des personnes, conjoints et enfants compris, c’est donc entre 1,9 et 3,8 millions de personnes qui vivent dans un ménage pauvre dont le chef de famille dispose d’un emploi.

Toujours plus de travailleurs pauvres

La pauvreté est directement liée au développement des emplois peu rémunérés. Sur les 4,2 millions de personnes de 18 à 59 ans en situation de pauvreté en 2006, 1,85 million était en emploi, contre 1,55 million en 2003. Si l’on prend en compte le nombre de personnes vivant dans des ménages au niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté, les ménages de travailleurs pauvres en emploi représentaient 3,16 millions de personnes en 2003 et 3,62 millions en 2006. Soit une augmentation de 500 000, pour un nombre total de personnes en situation de pauvreté qui s’est accru de 800 000 : l’extension de la pauvreté laborieuse est donc désormais le principal facteur d’aggravation de la pauvreté.

Parmi les secteurs les plus touchés, l’hôtellerie restauration où l’on recense presqu’un salarié pauvre sur cinq et les services personnels et domestiques avec un salarié sur six. Même la branche de l’intérim ne parvient pas à faire aussi mal, puisqu’on y dénombre un salarié pauvre sur huit. Le développement de l’emploi de mauvaise qualité, notamment des «services directs aux particuliers», est le principal responsable de la progression de la pauvreté. Permettre à tous ceux qui le souhaitent d’accéder à l’emploi est essentiel, mais il convient aussi de veiller à ce que cet emploi soit de qualité suffisante pour en vivre de façon décente. Le RSA améliore la situation d’une majorité de ménages de travailleurs pauvres. Mais pas de tous, puisque ce complément de revenu n’est versé ni aux travailleurs de moins de 26 ans (sauf s’ils ont des charges de famille) ni aux chômeurs, qui font pourtant partie de la population active.

Que peut faire le CE ?

Avec ses moyens, le comité d’entreprise est en mesure de repérer les travailleurs pauvres et peut, ponctuellement, leur venir en aide.

Identifier les salariés les plus précaires. Les élus peuvent s’appuyer sur l’analyse des informations relatives aux rémunérations dans l’entreprise (rapport entre la moyenne des rémunérations des cadres et celle des ouvriers et employés, que l’employeur doit communiquer, à comparer avec le nombre d’ouvriers et employés et la rémunération mensuelle moyenne) pour évaluer le nombre de salariés ayant un bas salaire dans l’entreprise. En outre, l’entreprise est dans l’obligation de transmettre chaque année au CE un bilan du travail à temps partiel dans l’entreprise (relatant le nombre, le sexe et la qualification des salariés concernés), ce document est utile pour avoir une appréciation du nombre de travailleurs touchant un bas salaire et détecter des difficultés financières.

Les aides financières

Outre les subventions habituelles (chèques vacances, chèques cadeaux, chèques emplois services universel, etc.), le comité d’entreprise est habilité, dans le cadre de sa mission sociale et culturelle, à accorder tout type d’aide s’il la juge pertinente. Il peut mettre en place des aides au logement ou à l’emménagement, des aides à la rentrée scolaire, etc. Les aides ponctuelles directes (dons financiers du CE) aux salariés en difficulté, ou des prêts à taux 0%, sont enfin possibles. Pour toutes ces aides financières, le CE doit cependant respecter plusieurs conditions.

Le secours aux salariés

Le comité d’entreprise a la possibilité d’allouer une somme d’argent, sous forme de don, à un salarié qui rencontrerait des difficultés financières particulières. Le secours aux salariés entre dans le champ des activités sociales et culturelles, il doit en conséquence être accordé de façon individuelle, ouvert à tous les salariés sans discrimination et répondre à un état de réelle nécessité.

Pour être qualifiée de secours, l’aide accordée par le comité d’entreprise doit réunir cumulativement plusieurs conditions. Elle doit répondre à une «situation individuelle particulièrement digne d’intérêt», être exceptionnelle, par suite de circonstances dont le bénéficiaire n’est pas responsable, être indépendant du statut du bénéficiaires (ancienneté ou position hiérarchique) et enfin être d’un montant modeste et individualisé. Si le secours est conforme à ces quatre critères, alors il n’est pas assujetti à cotisations sociales. Pour se prémunir d’un éventuel redressement de l’Urssaf, les élus ont tout intérêt à constituer leur dossier de secours de manière particulièrement étayée : cas concret, avis de l’assistante sociale, preuves irréfutables d’une gêne du salariés…

Dans tous les cas où cela est possible, le comité d’entreprise a intérêt à verser le montant du secours directement aux organismes vis-à-vis desquels le salarié est endetté. Cela évitera les risques de mauvaises utilisations de fonds et permettra aux élus d’apporter un justificatif à l’Urssaf. Enfin, si le secours ne doit pas être confondu avec le prêt au salarié, en revanche un prêt non remboursé peut être transformé en secours si cela est justifié par une situation « digne d’intérêt »Observatoire des inégalités :
www.inegalites.frRSA et Prime pour l’emploi (PPE) bientôt remplacé ?

Une «prime d’activité» pour remplacer les actuels dispositifs d’aide aux travailleurs pauvres, RSA-activité et Prime pour l’emploi, jugés peu efficaces : ce sont les recommandations du rapport du député Christophe Sirugue (PS) remis en juillet 2013 au gouvernement.

Le RSA et le PPE ne remplissent par leurs objectifs

Mis en place mi-2009, le RSA activité, qui sert de complément à un petit salaire, n’est demandé que par un tiers des personnes qui y ont droit, en raison de sa «complexité» ou par crainte d’une «stigmatisation». Quant à la PPE, crédit d’impôts créé en 2001, le rapport montre qu’elle est «distribuée très largement, ce qui aboutit à un saupoudrage de la dépense publique et à un ciblage insuffisant des publics bénéficiaires». En outre, «l’effort public en faveur des travailleurs modestes se réduit continuellement depuis 2008, en raison du gel du barème de la PPE décidé à cette date». Les deux dispositifs actuels coutent environ 4 milliards d’euros par an à l’Etat. Près de 8 millions de personnes réparties au sein de 7 millions de foyers en sont bénéficiaires.

Un complément enfant

Parmi les propositions du rapport Sirugue, la création d’une prime d’activité qui se substituerait aux deux dispositifs existants et serait ouvert aux 18-25 ans contrairement au RSA-activité (300 000 jeunes supplémentaires seraient éligibles). Les ressources de l’ensemble du foyer devraient aussi être prises en compte pour déterminer l’éligibilité du demandeur. Selon le rapport, son maximal serait de 215 euros par mois pour une personne gagnant 70 % du Smic. Enfin, pour favoriser les familles les plus fragiles (mono parentales et mono activité), cette prime serait accompagnée soit d’un « complément enfant », soit d’une majoration de l’allocation de rentrée scolaire.Le mise en place de la prime d’activité devrait porter le taux de recours à 60 % (contre 32 % pour le RSA-activité). Le taux de pauvreté serait réduit de 0,5 point si seulement la moitié des personnes éligibles la demandaient.